Comment êtes-vous arrivé à devenir expert dans le domaine du crypto-actif ?
J'étais expert des marchés traditionnels avant d'essayer de comprendre ce qui se passait sur les cryptos. En sortie d'école d'ingénieur, j'ai immédiatement commencé ma carrière comme trader de produits dérivés, et j'y ai passé 25 ans ! Ayant traversé plusieurs crises et une croissance forte sur ces produits, j'ai trouvé l'évolution des marchés actions passionnante, notamment depuis l'apparition du trading électronique au début des années 90.
Il était donc très naturel que je me pose les mêmes questions sur les marchés crypto. C'est d'ailleurs l'une des thèses de SUN ZU : nous pensons que les mêmes causes auront les mêmes effets, c'est à dire que l'institutionnalisation et la professionnalisation des acteurs dans la crypto entraîneront une évolution similaire sur les pratiques de marché, évolution qui en toute logique sera fortement "suggérée" par les régulateurs.
Selon vous, quelle connaissance ont les acteurs économiques du crypto-actifs ?
A mon sens la réponse pour les particuliers français est immédiate et sans appel : leur connaissance des marchés financiers est mauvaise, et celle des cryptos catastrophiques. Ceci tient à une faible culture de l'investissement en général, et c'est corroboré par de nombreuses études : les français ne connaissent pas le fonctionnement des marchés ou des instruments même les plus simples. Comme les actifs digitaux intègrent des éléments de complexité supplémentaires sans un emballage de simplification, le résultat est clair : les particuliers qui n'ont pas abordé le sujet en faisant de vraies recherches ne maîtrisent ni la technologie, ni les risques financiers.
Pour les professionnels, le jugement est évidemment plus nuancé. Entre 2016 et 2022, de nombreuses institutions financières ont pris la peine d'étudier les actifs digitaux, l'intérêt général étant bien entendu corrélé au prix du bitcoin.
Est-ce que tous les sujets sont maîtrisés ? Certainement pas, mais les grandes masses sont probablement bien comprises, notamment par contraste avec les instruments déjà connus. Si j'ai réussi à comprendre les différences entre le bitcoin et une devise "normale", j'ai probablement cerné les caractéristiques intrinsèques du bitcoin, et par la même occasion j'ai probablement compris ce que je peux en faire pour mon portefeuille ou celui de mes clients.
Pour autant le monde des actifs digitaux n'étant pas régulé, il est encore peuplé d'experts divers qui recommandent tout et n'importe quoi. Le régulateur a mis de l'ordre dans le démarchage commercial depuis longtemps dans la TradFi, il reste beaucoup à faire dans l'éco système crypto.
comment percevez-vous l’intérêt de vos étudiants français sur le sujet ?
Les cryptos ne sont pas un thème majeur dans mon cours de risk management, mais je vois bien que j'ai plus de têtes levées et de regards curieux quand j'en parle que quand j'explique le fonctionnement d'une V@R ! Je serais prêt à parier que nombre d'étudiants ont joué avec des cryptos sans jamais avoir touché une action ou une obligation.
